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Martin CHAVE

La Justice aux trousses d’un criminel de guerre libérien


« Les Libériens n’ont pas accepté le statu quo de l’impunité au Liberia ».


Moses Thomas va devoir rendre des comptes. Chef de l’unité spéciale anti-terroriste des Forces Armées du Liberia (AFL), il est soupçonné d’avoir donné des ordres durant la tuerie de l’église Monrovia, épisode des plus sombres de la guerre civile au Liberia.


Le 29 juillet 1990, ses hommes font irruption dans l’église Saint-Pierre de Monrovia et font 600 victimes. Des hommes, des femmes et des enfants. La plupart appartenaient aux tribus Mano et Gio, alors accusées de soutenir la rébellion menée par Charles Taylor et Prince Johnson face au Président Samuel Doe. Le viol est également associé à ce massacre. Les soldats de l’AFL violent ici des femmes de ces tribus Mano et Gio, avant de les exécuter sommairement.

Au Liberia, durant toute la guerre civile, le viol a été massivement utilisé. Ce fut une arme à visée ethnique, utilisée spécifiquement contre certaines tribus. Mais aussi à visée économique, permettant le contrôle de territoires et l’accès à certaines ressources. Le viol vise bien une stratégie multiple, le cas du Liberia étant particulièrement révélateur. L’un des objectifs de #WWoW est justement de mettre en lumière ces éléments et de montrer que c’est une arme pernicieuse à plusieurs facettes.

Les choses avancent : cette plainte déposée contre Moses Thomas fait écho au procès de Mohammed Jabbateh en octobre dernier, pas en avant décisif pour l’établissement d’une justice post-conflit. Lui aussi était accusé de meurtres, de viols, de torture mais aussi d’esclavagisme.

Toutefois, si Moses Thomas est inquiété aujourd’hui, il ne faut pas éluder la responsabilité d’autres criminels. En effet, dans le conflit au Liberia, les bourreaux sont issus de chaque camp. Malgré près de 250 000 morts entre 1989 et 2003, et une Commission pour la Vérité et la Réconciliation établie en 2006, aucun responsable n’a été condamné par la justice libérienne. Charles Taylor purge une peine de 50 ans de prison, mais n’a été jugé que pour ses crimes commis en Sierre Leone. Quant à Prince Johnson, chef rebelle ayant lui-même torturé le Président Doe, il est devenu Sénateur au Liberia, et n’est pour l’instant nullement inquiété pour les exactions commises.

La justice et la reconnaissance des victimes de cette guerre civile, doivent être au centre de la reconstruction du pays et des ambitions du nouveau Président George Weah.

Martin CHAVE


 

Photo © DR

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